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Maternelle de Philippe Blasband

Publié le 05/12/2008 par Dimitra Bouras et Antoine Lanckmans / Catégorie: Tournage

Voilà déjà plusieurs mois que nous attendons la sortie en salles de Coquelicots, le long métrage de Philippe Blasband, découvert au Festival de Mons en février 2008. Après avoir été post-posé à plusieurs reprises, l'événement est enfin annoncé pour ce mois de décembre ! Le hasard du calendrier fait que nous rencontrons le réalisateur sur le plateau de Maternelle, le long métrage suivant, avant même qu'il n'ait fait la promo du précédent... On sait que les salles n'ont plus de places pour les films à budgets réduits, qu'elles sont obligées de distribuer les blockbusters à des dates précises et essayer d'intercaler les sorties parallèles, mais on n'imaginait pas un écart aussi grand entre la fin d'un film et sa sortie. Heureusement que Blasband n'a pas que la création cinématographique comme forme d'expression, il aurait eu tout le loisir d'abandonner !
Dans les ruelles sinueuses de Watermael-Boitsfort, où l'on rencontre plus de chats traversant la rue que de voitures, nous débarquons dans une petite école de quartier, mise à la disposition de l’équipe pendant les vacances scolaires de la Toussaint. Ainsi, à la veille d'Halloween, nous embarquons dans une histoire de fantôme qui vient titiller le souvenir d'une directrice de maternelle.

Cinergie : Après La Couleur des mots il y a eu Coquelicots, et maintenant Maternelle. On retourne dans ce dernier film vers une relation filiale, une histoire plus proche de La Couleur des mots. C’est ce genre d’histoire que tu préfères ?
Philippe Blasband : Non, je suis très éclectique dans mes goûts cinématographiques, mais il est vrai que je suis fasciné par la relation mère/fille, dans laquelle il y a énormément d’amour, et, en même temps, beaucoup de concurrence et de conflits. Ça ne peut être qu’intéressant pour raconter une histoire.
 
C. : Et la relation père/fils ? Est-elle différente ?
P.B : Oui, parce que l’histoire d’un homme peut ne pas en être une : certains hommes ne se posent jamais de questions et n’ont jamais de problèmes. Parfois, un père et un fils s’aiment bien, ou ne s’aiment pas, mais on en reste là, il ne se passe rien. Tandis que, selon moi, il y a toujours une histoire entre une mère et une fille.
 
C. : Et dans Maternelle, quelle est cette histoire ?
P.B. : Il y en a plusieurs, autant que de couples mère/fille, mais le couple principal est Viviane et sa fille. Viviane a du mal à prendre sa place de mère, car sa maman a été absente de sa vie, elle n’a pas eu l’expérience d’être une fille. Elle se comporte donc comme une copine. Elle a un côté très infantile et se sent en concurrence avec elle.
 
C. : Aylin Yay est la muse dont tu ne veux pas te séparer, je parle uniquement du domaine du cinéma. Est-ce que vous travaillez le scénario ou les dialogues ensemble ?
P.B. : Contrairement aux apparences, je ne pensais pas à Aylin quand j’écrivais le scénario ! J’ai rencontré Anne Girouard pour lui proposer le rôle de la mère de Viviane, et c'est elle qui a insisté pour jouer avec Aylin. J’ai trouvé que c’était une excellente idée, d’autant plus qu’elles ont beaucoup de traits de caractère en commun. Aylin est une comédienne extraordinaire, elle a la capacité de changer de facettes d’un moment à l’autre et de donner quelque chose de véritablement humain. Il faut dire aussi que je la connais très bien, on a beaucoup travaillé ensemble précédemment et donc, c’est très facile de la diriger maintenant.
J’ai quand même fait un casting, parce que le producteur n’était pas convaincu, il trouvait qu’Aylin avait l’air plus jeune que le personnage. Mais finalement, il s'est avéré que le rôle était indubitablement pour elle.

C. : Est-ce que le film est une réflexion sur l’éducation, sur la relation parents/enfants, et sur le fait que les parents ne trouvent pas leur place ?
P.B : Oui. Autrefois, être parent était facile, on était un tyran et c’était clair. Aujourd’hui, il faut être sympa et ouvert, tout en gardant une autorité. Il faut guider l’enfant, non pas parce qu’on a raison, mais parce qu’il a besoin d’être guidé. Plus tard, il pourra se révolter contre tout ce qu’on a voulu lui transmettre, mais il faut lui avoir exprimé des opinions, lui fixer un cadre au préalable pour qu’il puisse se développer.
C’est très compliqué à gérer comme situation, et cela risque d’être destructeur si on ne prend pas cette place de façon assez franche. Quand je vois certains parents, je me dis qu’ils feraient mieux d’être des tyrans. Mais il est certain que c’est extrêmement compliqué et que chaque parent fait de son mieux, je ne veux pas jeter la pierre.
  
Philippe Blasband, appelé par la mise en place de la prochaine séquence, cède sa place à Anne Girouard, détendue et tout de rose vêtue. Elle joue le fantôme de la mère de Viviane. Nous la rencontrons dans le décor d’une classe colorée dans des tons orangés joyeux.
A.G. : Mais ce n’est pas mon décor principal ! Il se trouve que j’apparais quelquefois dans l’école, mais je suis principalement là quand Viviane est là, puisque je suis le fantôme de sa mère qui meurt au début du film et qui vient lui rendre visite à plusieurs reprises.

C. : Et Viviane est-elle effrayée par le fantôme de sa mère ?
A.G. : 
Ah ça oui ! Elle est d’abord terrorisée, elle ne croit pas aux fantômes. Par la suite elle y croit. Le problème, c’est que sa mère lui fait se poser des questions qu’elle n’a pas envie de se poser, elle la met face à elle-même et règle ses comptes.
 
C. : Le rôle que vous jouez est particulier : vous êtes un fantôme et vous êtes plus jeune que votre fille. Qu’est-ce que cela vous procure comme sentiment ?
A.G. : C’est très bizarre. Je trouve cela marrant de jouer un fantôme parce qu’on ne voit cela que dans les films ou dans les livres. C’est très agréable de jouer quelque chose qui n’existe pas. Et puis, le hasard a voulu que je sois réellement enceinte pour la première fois sur le tournage, j’expérimente donc la maternité dans le film et dans ma vie, c’est assez étrange, mais c’est drôle.

C. : Le fait de jouer un rôle de mère vous fait-il réfléchir à propos de l’éducation de votre propre enfant ?
A.G. : Oui bien sûr, mais j’espère que ma relation avec mon enfant sera plus paisible que dans le film ! La base du film, c’est que Viviane et sa mère se sont loupées. Mon personnage quitte le foyer conjugal alors que Viviane est très jeune, et elles se revoient pour la première fois plus de dix ans plus tard, quand Viviane est adolescente. L’une en veut à l’autre parce qu’elle est partie, et l’autre lui en veut parce qu’elle n’a rien fait pour la retrouver. J’espère que ma relation avec mon enfant sera plus épanouie !
  
C. : Comment s’est passé votre rencontre avec Philippe Blasband ?
A.G : Je l’ai rencontré, il y a un peu plus d’un an. Il m’avait vu jouer à la télévision et il m’a proposé ce rôle en 
me disant qu’on devrait faire des essais. J’ai tout de suite apprécié le rôle donc j’ai fait les essais et apparemment ça lui a plu. Pendant un an, j’ai attendu avec impatience de pouvoir jouer ce rôle.
 
C. : Dans le film, c’est la relation mère/fille qui est mise en avant, plus que le caractère des personnages. On est vraiment centré sur la relation entre les personnes. Est-ce que cela a demandé un travail de préparation particulier ?
A.G. : La matière, on l’a forcément. On a toutes eu une maman et une relation avec elle, et on a toutes un potentiel de maternité. C’est un travail à aborder avec soi-même, sans avoir besoin de préparation particulière. Il y a quelque chose d’universel, mais c’est une histoire spécifique avec des problèmes spécifiques, donc le plus dur était d’entrer dans cette spécificité et de raconter cette histoire particulière.
 
C. : C’est votre premier tournage en Belgique ?
A.G. : Tout à fait, et j’en suis très contente. J’ai déjà joué au théâtre à Mons, mais c’est mon premier tournage en Belgique. J’en suis ravie parce que je trouve que l’ambiance est super et que les gens sont formidables. Chaque personne est très compétente, quel que soit son poste.

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