Urbaine solitude
Le dispositif qui préside à la réalisation du premier film documentaire d’Eric Smeesters est, au premier abord, simple et empreint d’une certaine innocence. Pendant un an, le réalisateur a planté sa caméra dans un lieu public particulièrement fréquenté dans le centre de Bruxelles et, comme il le dit au début de son film, a sauté dans le vide. Il a filmé. De jour comme de nuit, sans calendrier préconçu, il a filmé dans la foule des grands jours comme dans l’isolement de la nuit profonde. Il a filmé des hommes et des femmes seuls, déambulant, s’arrêtant ou restant assis sur un banc, comme à la marge de la foule, à la périphérie du flux marchand, un rien déboussolés, un rien isolés, un rien là, seulement là. Face à sa caméra, il les a voulus surpris, gênés, troublés, curieux et parfois même amusés, voire complices, mais toujours inconnus, anonymes. Accordant beaucoup d’attention à la durée de chaque plan, restant à l’affût, en tension de regard, il a su rendre palpables les questions que cet exil urbain appelait.