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La Balançoire de Christophe Hermans

Publié le 01/01/2015 par Sarah Pialeprat / Catégorie: Critique

Des hauts, des bas.
Si, l'année dernière, le jury du Festival Media 10-10 de Namur avait été séduit par l'univers noir et blanc de Christophe Hermans avec son film Le Crabe, cette année, le réalisateur confirme son talent avec La Balançoire, et repart avec le Prix des Auteurs de fiction. Le film avait déjà reçu, il y a quelques semaines, le Prix du Meilleur Court Métrage en compétition nationale et le Prix d'interprétation pour Jean-Jacques Rausin au FIFF de...Namur. Une ville qui semble lui porter chance.

La balançoire de Christophe HermansC'est l'heure des bilans... des bilans de couple. Un mot : désastreux. Ça se sépare là, ça crie ici, ça se dispute, ça pleure surtout... de rage, d'impuissance, de fatigue. Les réalisateurs de 20 ans, enfants de divorcés, font-ils œuvre cathartique pendant que ceux, déjà trentenaires, témoignent des difficultés de leur propre séparation ?
Nul ne sait... 

Pour donner un peu d'espoir dans  « le serial divorced » que nous proposait les courts métrages belges de cette année de crise pas que financière, le réalisateur Frédéric Guillaume, avec son documentaire En attendant Juliette, filmait attentif, la venue au monde de son enfant, le corps de celle qui apprenait à devenir mère... Joie, amour : doux silence à nos oreilles.

Mais, visiblement, c'est bien la séparation et non l'enfantement le grand sujet du moment. Au milieu de ce tumulte infernal, le Jury en a choisi un, La Balançoire qui aborde, de manière originale et sensible ce sujet si délicat.

Ludovic a deux maisons, celle de maman et « Marc », et celle de papa tout seul. Entre les deux, il y a une station-service où les deux adultes se rencontrent furtivement pour s'échanger le fruit de leurs amours devenues périmées. Si, comme beaucoup d'enfant, Ludovic a deux maisons, il a aussi deux surnoms, celui que lui donne sa mère (Lulu) et celui que lui donne son père (Ludo), histoire de bien délimiter le territoire affectif, de créer deux enfants distincts en un. Il n'y a pas que les enfants qui jouent à "on dirait que", les adultes y excellent souvent aussi.
Alors que Ludovic et papa attendent que maman arrive, toute l’histoire du rapport familial, des problèmes du couple se lisent à travers la relation père-fils, une relation fondée sur le jeu, les chansons, les blagues et les contes imaginaires. Et c’est ce fil que casse en entrant en scène celle qui vient reprendre son fils pour vivre avec lui d’autres moments. Seulement voilà, il y a la balançoire de leur ancienne maison, et Ludovic ne voulant faire un choix entre son père et sa mère demande de l’installer dans ce lieu d’échange, dans cet entre deux, sur l’aire d’autoroute.

Si l’on retrouve ici, les mêmes thèmes visuels (la station-service) et narratifs (la relation au père) que dans le court métrage précédent, Le Crabe l’écriture en est à la fois plus fluide et plus condensée. Les autruches du crabe qui servaient de simple élément poétique et décoratif ont laissé place à un renard qui va renforcer l’intensité du lien affectif. Christophe Hermans, en abandonnant ainsi la surenchère visuelle et les gimmicks, accède à plus de profondeur et de finesse. Avec une petite planche en bois et deux cordes, il joue entre équilibre et déséquilibre avec une belle habileté. 

 

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