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Le Barbier de Julie Descarpentries

Publié le 02/12/2008 par Anne Feuillère / Catégorie: Critique

Dans le cadre du programme  « Portraits croisés », qui consiste en l’échange d’étudiants entre des écoles de cinémas partis réaliser… des portraits donc, Le barbier du Julie Descarpentries est une coproduction INIS-INSAS réalisée à Montréal. Prix de la Communauté française Wallonie-Bruxelles au Festival International des Ecoles de Cinéma de Huy, Prix Spécial du Jury dans la compétition nationale au Festival du Film Indépendant de Bruxelles, Prix des Auteurs (SACD-SCAM) à Média 10-10, ce petit film modeste fait l’unanimité.

Le Barbier de Julie Descarpentries

Frontalité

À quoi cela tient ?Sans doute d’une part au sujet du film : Julie Descarpentries pose sa caméra dans un centre d’accueil qui offre un soutien et une aide aux gens démunis et sans abris. Elle va à la rencontre du barbier qui y sévit depuis quelques années. À l’âge de 80 ans, Roger taille encore bénévolement la barbe et les cheveux à ceux qui en ont besoin. Vigueur, patience, discussion, il fait son travail en bon artisan qui se respecte, avec application. Cette modestie qui consiste à faire du mieux qu’on peut, comme on peut, quel que soit celui qu’on sert, et de mesurer l’importance de la dignité qui se met en place au fil des coups de ciseaux fait toute la beauté de cet homme simple et sans préjugés. Entre Roger et ses « clients », il n’est pas de place pour le jugement et l’inégalité.

D’autre part, Le Barbier procède d’une belle frontalité. En posant sa caméra dans cette petite salle de coiffure, en suivant les gestes de Roger (coups de ciseaux, coups de balais, coups de torchons), ses discussions avec ceux qui viennent rechercher là un peu de vigueur autour de leur visage abîmé, la jeune réalisatrice ne cache pas sa présence (on aperçoit plus d’une fois sa caméra dans le miroir), ses embarras (certaines de ses questions font des flops), ni l’inconfort de sa position (quand elle se heurte aux réticences de ceux qu’elle vient filmer ). Et c’est tant mieux, car sa démarche de réalisatrice est partie prenante, fait sens en ce qu’elle est impliquée dans ce qu’elle filme.

Mais tout de même, au-delà de ce beau portrait et de cette démarche assumée dans ses maladresses, on reste un peu sur sa faim à la sortie de ce film au sens où la réalité de ce qui nous est montré n’est en aucun cas interrogée. Le film dresse le constat, réconfortant et émouvant peut-être, qu’il y a encore de belles personnes qui donnent de leur temps à ceux qui en ont besoin, et que les plus démunis sont des gens comme tout le monde. Certes… Mais on n’en doutait pas avant de voir le film.

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