D’origine russe par sa mère et belge, par son père, Marie André est née (1951), vit et travaille à Bruxelles. Passionnée par le théâtre, elle entre à l’INSAS (B) qu’elle quitte après une année. Elle participe à la création d’une école expérimentale le « Snark » pour adolescents exclus des écoles d’enseignement traditionnel. La découverte des premières pièces de théâtre de Bob Wilson ravive son intérêt pour le théâtre, elle part pour suivre les ateliers de la Bird Hoffman School à New York (1974). En rentrant en Belgique, elle décide de réaliser des films. Tout en se lançant dans la réalisation, elle suit les séminaires d’écriture de scénario par l’AIF (American Film Institute) organisés à Bruxelles et les cours d’histoire du cinéma à la Cinematek (B). Elle a enseigné à Sint Lukas Instituut voor Beeldende Kunsten et à l’Académie royale des Beaux-arts de Bruxelles.
« A travers son remarquable ensemble de films et vidéos, lesquels mêlent et transcendent les genres comme la fiction narrative, le portrait, le documentaire et le spectacle, l’artiste belge Marie André s’est engagée dans l’acte subtil de l’observation. Dans des œuvres élégantes qui mettent l’accent sur la signification du quotidien, les gestes de tous les jours et l’intimité du détail, André suggère un dialogue personnel entre l’artiste et ses sujets. Le mode de vision singulier d’André est à la fois précis et sensuel. La caméra distanciée, le montage serré et une mise en scène mesurée créent des compositions formelles qui suggèrent la peinture, tandis que le regard imperturbable et l’acuité visuelle révèlent l’espace à l’écran. Avec des images minimales mais luxuriantes qui distillent l’essence de ses sujets, les œuvres d’André établissent un sens du temps, de l’atmosphère et de l’espace riche et intime. » Extrait du catalogue de Electronic Arts Intermix (EAI, New York)
Principales réalisations en vidéo, film et radio : GALERIE DE PORTRAITS (Grand Prix du Festival International d’Art Vidéo de Locarno, 1982), REPETITIONS/ Anne Teresa De Keersmaeker, chorégraphe (vidéo, Prix du Ministère de la Culture de la Communauté française de Belgique, 1985), COME TI AMO (vidéo, primé au Festival International d’Art Vidéo de San Sebastian, 1983), UN ANGE PASSE (vidéo 1986), LE FIL DES JOURS (film 16mm, 1994), NARCISSE AUX CHIENS/ Eugène Savitzkaya, écrivain (film 16mm, 1997), TROIS VOIX (essai radio 2000), TEMPS D’HIVER (film 16mm, 2002), NOUBA/ Eugène Savitzkaya (pièce sonore 2006), A ALEXANDRE SERGUEIEVITCH (film16mm, 2008).
Comme pour une réussite le hasard a disposé les cartes, je sentais une logique interne prendre forme peu à peu il n’y a pas eu de scénario écrit au préalable, j’ai d’abord observé puis filmé sans presque passer par les mots
quand nous installons le matériel dans un endroit j’ai l’impression d’être dans mon atelier, de posséder l’espace et l’histoire sera la prise de possession de l’espace, j’ai voulu filmer l’ « espace privé » de ces cinq femmes
le tournage d’Inna a commencé le soir
elle était étendue sur le lit, je plaçais la caméra sans savoir et comme je surveillais le moniteur pour des essais d’éclairage je découvre une image qui prend pour moi valeur d’icône, j’enclenche le magnétoscope et le tournage démarre, elle est étendue sur le lit pendant la préparation, elle bavardait sans attendre de réponse, cette phrase m’a accrochée, elle a ensuite guidé l’élaboration de son portrait
le matin quand je me réveille, je me demande
si je pourrai sortir
je me lève et je m’assieds dans mon fauteuil et je me dis que le mieux c’est dans mon fauteuil, de ma vie je n’ai eu d’aussi belles pantoufles. Une femme passe et repasse une porte sans raison, ses pas dans l’escalier,
elle repasse un drap blanc, le suspend puis nous l’abandonne
Où est le drame
elle déplace les objets sur la table
Elles ne font que se déplacer, déplacer des objets, aucune action qui puisse nous édifier sur ce qu’elles font, qui elles sont, à partir de gestes anodins dans lesquels je trouve le rythme propre de chacune elle se déplace entre la table et le mur, entre la table et la fenêtre, son champ d’action est limité, le mouvement est régulier à l’intérieur du cadre, il se fait lancinant, la forme tend à se détacher du fond et à se constituer en structure autonome, le mouvement devient figure quand soudain la main s’immobilise, elle retrouve sa réalité.
Ce (film) est présenté sans sous-titres, le sens des mots est d’un intérêt relatif, les dialogues sont là comme des bavardages et peu importe la langue, la sonorité de la voix, les intonations donnent plus de sens si l’on dégage les mots de leur signification, quand à la fin, la petite fille crée un jeu, elle épelle les lettres et parfois celles-ci reliées l’une à l’autre prennent un sens, ce sont les mots d’une phrase, elle a mis en jeu la structure-même du (film).
Marie André à propos de « Galerie de Portraits » (1982)