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Monsieur Pimpant, réalisateur de The Choolers : viandes et poissons

Publié le 23/02/2024 par Thierry Zamparutti / Catégorie: Entrevue

Arrivé le mardi soir dans la capitale du court métrage, Monsieur Pimpant, professeur en cinéma d'animation à l'École de Recherche Graphique (ERG) de Bruxelles depuis 2017 et faiseurs d'images, a la « tête qui tourne » (ndlr). Il nous explique pourquoi.

Monsieur Pimpant, réalisateur de The Choolers : viandes et poissons

Cinergie: Monsieur Pimpant, PinpanProduction.be, Pimpant.club... C'est tout un univers qui a interpellé le Comité de sélection pour retenir The Choolers : viandes et poissons dans la section Labo. Comment avez-vous vécu cette première reconnaissance?

Monsieur Pimpant : Au tout début, je ne m'en suis pas rendu compte. Je revenais d'une expérience catastrophique d'un festival à Paris, super mal organisé, frais d'inscriptions délirants, 5 personnes dans la salle... et je ne m'étais jamais vraiment renseigné sur les festivals de cinéma. 

C'est d'ailleurs le premier film que j'envoie en festivals, consécutif à la création de la maison de production PinPanProduction, avec Anne-Françoise Rouche, la directrice du Centre d'art brut & d'art contemporain "La S grand atelier" (situé à Vielsam - ndlr)

J'ai commencé à me rendre compte que Clermont-Ferrand était un gros festival quand j'ai annoncé ça à quelques amis dans la cuisine. En voyant leur réaction, j'ai un peu tiqué. 

C'est par la suite quand j'ai reçu un coup de fil de WBImages qui m'expliquait que c'était vraiment un gros truc, qu'ils ne me connaissaient pas, que je n'avais pas demandé d'aide pour le film, que ce serait sans doute une bonne idée qu'ils s'occupent de la publicité de mon film lors du festival sur leur stand au ShortFilm Market. (WBImages y tient un stand commun avec Flanders Image - ndlr)

 

C. : Il se disait ici et là qu'il y avait un film dans le programme Labo 2 dont l'animation était "rudement bien faite". Beaucoup de spectateurs ont été surpris et conquis. Comment le film s'est-il fait ? Quelle technique?

M. P. : C'est chouette d'entendre ça. J'ai reçu plusieurs commentaires un peu par hasard en discutant pendant et après le festival de personnes qui avaient vu le film et le trouvaient drôle.

Quant à la réalisation du film, c'est la convergence de beaucoup de mes pratiques et expériences des années précédentes. Je sculpte en VR les personnages, d'après des scans 3D des acteur.ices afin de garder les proportions du monde réel. La VR me permet de garder le geste brut du dessin, sans tomber dans le piège de tout lisser, optimiser, etc., piège très dur à éviter quand on fait de la 3D. C' est un domaine tellement précis, qui fait appel à tellement de connaissances, qu'il est parfois difficile d'y intégrer une forte charge expressive.

Les lieux sont modélisés soit de mémoire, soit recréés via des plans d'architecture. Les éléments de décors sont très simplement modélisés. Je voulais créer un fort contraste entre les personnages très expressifs et un décor assez doux. La lumière est travaillée de manière réaliste tandis que les textures sont très cartoons. Idem, je voulais trouver le sweet spot, la tension entre le documentaire et le film d'animation de fiction. C’est d'ailleurs le chemin que l'on souhaite emprunter avec cette maison de production. 

Le travail de caméra est lui aussi hybride. C' est un peu technique, donc je vais essayer d'être concis, mais en gros j'utilise deux méthodes pour filmer. La 3D se passe en partie dans les locaux, et dans ce cas je filme les lieux en me déplaçant physiquement, en imaginant les séquences que je vais reconstituer grâce aux enregistrements audio. Je viens ensuite importer ces mouvements de caméra en 3D afin de reconstruire la scène.

Soit, je suis dans mon studio, je mets en place une scène, et j'utilise mon iPad comme caméra, ce qui me permet de garder la physicalité, les déplacements et les mouvements naturels quand on tient une caméra.

Ces méthodes me permettent de garder un lien fort avec le réel quand je travaille sur ordinateur, afin d'éviter des plans robotiques et super lissés.

En termes de scénario, travail du récit, j'ai utilisé quelques extraits que Micha Volders a récoltés lors d'une résidence musicale en novembre dernier, et un enregistrement de Celenie Péteau Seidel 

lors d'une autre résidence avec Rodolphe Burger. J’ai passé pas mal de temps avec les gars à enregistrer différents moments, et j' ai ensuite pu me mettre au travail sur le montage audio.

Montage audio qui est la clé de voûte de ce travail, où je viens ensuite reconstituer les scènes en 3D, et les amplifier, ajouter des éléments de comédie ou de fantastique de-ci, de-là.

Je suis content d'avoir pu mettre cette méthodologie en place et je compte pousser ce langage sur les prochains projets.

 

C. : Vous êtes arrivé au milieu de la semaine du Marché. Quelles ont été vos impressions lors de la découverte du Festival et du Marché?

M. P. : Un énorme fomo (Fear Of Missing Out, la peur de rater quelque chose – ndlr) le premier jour.

Je ne suis pas un grand fan de ces endroits qui fabriquent des rencontres intéressées, et je pense que c' est une des raisons pour lesquelles je me suis tenu à l'écart des milieux du cinéma pendant si longtemps. J'ai eu l'occasion d'être dans d'autres milieux ces 15 dernières années et j'ai appris à garder mes distances aux endroits où se trouvent les professionnels. Je me guéris doucement de ces différentes expériences. Ce film et cette maison de production vont dans ce sens. Aussi, je suis professeur de cinéma d'animation à l'ERG à Bruxelles, j'ai ma première promo qui est en train de sortir et c' est une autre raison de tisser des liens avec les festivals, les différents corps de métier de cette industrie.

Je dois dire que concernant le ShortFilm Market, j' ai été très bien accueilli par Geneviève Kinet de WBImages. J'y ai fait de chouettes rencontres.

 

C. : Est-ce que vous vous étiez mis des objectifs de rencontres? Ou simplement celui de voir des films ?

M. P. : Oui j'ai écrit une wishlist le premier jour. Je n'y ai pas rejeté un coup d'œil depuis. Dans les grandes lignes, il était question de trouver un distributeur pour le film (ARTE m'a contacté, mais ils ne diffuseront pas le film), de réfléchir au prochain projet, une série qui va se passer entre Bruxelles, le Centre d'art brut la S, et d'autres endroits en Belgique et va mélanger documentaire et comédie, avec une partie du casting constituée de personnes handicapées et d'autres invité.es de différents domaines. 

En gros, je n'ai sollicité aucun rendez-vous, mais j'ai participé à quelques événements auxquels j'étais convié, un déjeuner entre la Suisse, la France et la Belgique, et une session de rendez-vous avec différentes résidences d'écritures pour le prochain projet. 

J'ai envie que le film parle de lui-même et de discuter avec des personnes qui l'ont vu et sont intéressé.es. Ce qui est arrivé à plusieurs reprises et j'en suis très content. 

 

C. : Avec le recul, qu'est-ce que vous gardez de votre séjour? Avez-vous des attentes ? De nouvelles perspectives ?

M. P. : Très impressionné par cette ville hypnotisée par le cinéma pendant une semaine, c'est une sacrée expérience que de se balader dans la ville et de voir une demi-heure de queue pour aller au cinéma dès 9h du matin.

Des attentes ? Oui, j'aimerais bien que le film continue sa vie après les festivals et trouve une plate-forme pour l'accueillir, on verra bien ce qui se tramera par la suite. Le film vient d'être projeté à ANIMAC en Espagne. Il est à ANIMA à Bruxelles fin février et à Amsterdam en avril. J'attends encore pas mal de réponses quant aux prochains festivals.

 

Merci Monsieur Pimpant, qui m'a permis de me rappeler qu'avant ma 25e participation au Festival, j'ai vécu, moi-aussi, une première fois.

The Choolers : viandes et poissons est en sélection dans la Compétition C'est du Belge du Festival ANIMA du 23 février au 3 mars 2024. Sélection officielle Anima 2024 | Anima Festival

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